Lettre à mon fils (écrite pendant la grossesse).

Et c’est ainsi que le rêve prit fin, que je naissais au monde, ceux qui m’aimaient venaient de m’enlever ce qui faisait ma vie, en 3 jours je quittais amis, école, maison, style de vie. J’entrais dans la vie comme on entre en prison, les journées allaient être longues et difficiles et les nuits pourvoyeuses de mauvais sommeil. J’ai pris perpétuité alors que je n’étais pas coupable si ce n’est d’exister !

Mais tout passe… la douleur s’estompe, les pleurs ne sortent plus, s’ils sont jamais sorti, on se borne à vivre au jour le jour… on en oublie de regarder ce qui fait notre vie et on avance…. De temps en temps repasse dans un regard une certaine nostalgie d’un moment trop vite passé, d’une vie fort différente, d’un monde qui peu à peu prend des allures de chimère. Et même dans ses propres rêves on n’y pense plus en tant que rêve mais en tant qu’improbable.

Puis on avance encore, et la chimère se gonfle de voile de brume, on commence à oublier ce qui la composait… on en oublie les éléments ou même on les nie. Commence alors le desert de son enfance… qu’as t’on vécu de si fort que l’on ne s’en souvient pas, après quelles images coure t’on, de quels manques souffrons nous de temps en temps ?

Et un jour on rencontre celui qui nous manque, celui qui nous prouve que ce rêve a prit fin une fois, mais que ce rêve peut renaître. Qu’il suffit pour ça d’y mettre son cœur. Et on se dit: et si j’y croyait à nouveau ? Et si nous, lui et moi, pouvions à notre tour concevoir un rêve pour un autre que nous, un plus petit que nous. Un petit nous. Et nous nous amusons à jouer les créateurs, au début c’est un jeu, le jeu de l’amour, puis petit à petit ça devient réalité. Les nuits sont toujours pourvoyeuses de mauvais sommeil et de bons cauchemars. Mais aux réveils la réalité a changé, et les souvenirs et les doutes et les questions sur notre propre rêve, celui de notre enfance, reviennent. C’est une petite victoire, on oublie d’oublier ce passé qui n’avait plus de consistance. Il redevient chimère, pas encore rêve, mais il revient.

Puis un jour nous nous levons et découvrons que le mauvais sommeil a eu d’autres causes que cette douleur. Ces insomnies sont neuves… Elles portent la marque d’un petit être qui, pas encore né, est quand même déjà bien présent. Qui porte un nom, qu’on appelle notre fils ou notre fille… et qui nous fait d’avance pleurer toutes les larmes de notre corps. On se promet que l’on ne cassera pas son rêve, qu’on ne lui cassera pas son enfance, qu’on fera au mieux. On ne peut pas savoir si on y arrivera … mais déjà les brumes des chimères sont loin, et le rêve est à nouveau la, il porte un nouveau nom: espérance.

Mon fils ne serait ce que pour m’avoir ramener mes rêves, ne serait ce que pour m’avoir permis de concrétiser cet amour si fort que j’ai pour un homme, rien que pour ça je t’aime déjà.