Nous n’étions pas d’ici, nous savions déjà que nous n’y resterions pas…

Nous étions là, suivant nos parents, attendant leur décision, pour savoir si ce lieu serait le notre une ou deux ou peut être trois années.

Nous n’étions pas de là, nous étions d’ailleurs, ça nous donnait une vie différente. Nous en avions conscience.

Nous n’étions pas même arrivé que nous savions déjà que nous repartirions, que nous n’avions aucun pouvoir sur cette décision.

Nous n’étions de nul part, car pour beaucoup nous n’avions vécu que d’autres pays… mais pas le notre.

Le notre était ce celui ou nous vivions ? Ou celui des fêtes de noël et des grandes vacances ?

Nos amis ? Qui étaient il ? Venaient il d’ici ? De là ? De notre pays ? D’un autre pays ?

Nous étions hors du monde, car quand nous sommes rentrées c’était comme si ces années n’avaient pas existé pour les autres… Si pour nous elle étaient blessures car abandon, pour les autres elles étaient bonheurs car retour.

En parler ? A qui ? C’était une autre vie, une vie difficile à raconter.

Je pensais être la seule à me dire ça… Je me rends compte que c’est faux… Quelques mots échangés sur FB, la gorge qui se sert, les mots qui sortent en amas épais, besoin de dire enfin. Sensation de délivrance. Compréhension totale et complète, même mots de l’autre coté du clavier.

Je ne suis pas seule, je ne suis plus seule, je n’ai jamais été seule à ressentir ça. Mais sans ces autres qui ont vécu cette même vie ailleurs, je ne le savais pas.

Nous n’étions pas de la bas, mais la bas est un peu en nous.

1 degrés, il pleut, il fait froid…

J’ai 11 ans, nous sommes à Southampton chez des amis de ma mère.

J’ai froid. Nous devons être en février.

Dans la chambre je suis collée au radiateur. Le froid est en moi. Je suis littéralement collée au radiateur. Mon dos brûle. L’arrière de mes bras aussi. Mais j’ai froid à la poitrine, froid partout ou je ne brûle pas. La ou je touche le radiateur ma peau est même douloureuse. Je suis littéralement en train de me brûler en écrasant ma peau sur le métal brûlant. La chaleur traverse mes vêtements. J’ai mal. Mais entre cette douleur et le froid que je ressens… je préfère cette douleur.

Combien faisait il dans cette maison ?

Aucune idée, peut être 17 degrés. J’étais frigorifiée.

Dehors il fait 1 degrés. Nous sommes en novembre. L’hiver va être long…. et j’ai une pensée pour mon ami Tchadien qui vit … en Suède: le fou !

J’ai envie de vous parler de mon mon afrique à moi…

Telle que je l’ai vécu, telle qu’elle est vivante encore et encore dans ma mémoire et dans mes veines.

Je me souviens avoir cru mourir sur ce tarmac d’aéroport, avoir senti l’air brulant glisser difficilement dans ma gorge, m’être demandé comment j’allais pour vivre et travailler ici si pendant 2 mois il fallait que je pense à respirer, tant l’acte m’était difficile.

Je me souviens avoir traverser ce tarmac à pied, sous la lune. Et dire que l’air y était encore trop chaud pour moi, en pleine nuit.

Je me souviens de cet aéroport désué et si simple. Je me souviens m’être dit que le coté provincial de cet aéroport me plaisait. Je me souviens avoir vu les militaires en arme, avoir senti les sentiments à fleur de peau de chacun. L’air empli de tension, de sentiment, de violence, de langueur aussi et d’indolence.

Je me suis sentie chez moi.

Comme l’impression de revenir chez moi.

Nous avons pris nos bagages, j’ai revécu mon enfance sur un autre continent, ou les passeports ne valent que si dedans, un billet négligemment déposé, trouve preneur d’un geste leste. J’ai souris à ce souvenir.

Nous sommes montés dans ce pick up. Pour rien au monde je n’aurais cédé ma place derrière. La cabine n’est pas pour moi. Debout derrière la cabine, je me tiens droite, tenant la barre de maintient. Je respire toujours aussi mal, mais la sensation diminue de minute en minute. La piste est bonne dans la capitale et le pick up prend vite de la vitesse.

La brise souffle, l’air chaud s’engouffre dans la gorge. Un moment d’infini, un de ces moments qu’on garde en tête toute sa vie, est en train de se passer. Ne rien laisser passer, profiter de chaque seconde. Le Tchad est en train de me rentrer dans les veines.

Malheureusement dans les voyages en Pick Up, il y a toujours une partie désagréable… ça cesse… on doit bien arriver un jour.

Il est tard, il faut manger. J’apprendrais au Tchad, qu’il y a 2 façons de manger, l’Africaine et l’autre, celle des blancs. Pour ce soir ce sera l’autre façon de manger, repas sans imagination, cuisine Française sans en avoir les ingrédients… Pas grave, trop de choses à découvrir, trop de nouvelles personnes, trop de nouvelles façons de voir, concevoir les choses. Je découvre le monde des expats, pas celui que je connaissais. Je connaissais celui des militaires, des gradés de haut rang, des soirées de l’ambassadeur, des architectes exilés à l’autre bout du monde pour le projet de toute une vie, un nouvel aéroport par exemple, des gens qui ont évolué selon leurs compétences. Ca ne rend pas les gens humains certes…

Je découvre des expats gagne petits pour la plupart des gens d’associations humanitaires Françaises, un monde en vase clos, des gens quelques peu aigris. Ma description n’est valable que pour les Français, les Belges s’en sortent bien mieux même s’ils passent pour des racistes aux yeux des français.

Je découvre le microcosme des Associations humanitaires. Et ça vaut son pesant de cacahouette.

Cette première nuit m’apprend qu’au Tchad on se réveille avec la température, quand elle commence à monter, que dormir devient difficile, on se lève.

J’apprendrais aussi assez vite que nous n’avons pas tous la même résistance à la chaleur, je me réveillerais toujours plus tard que mon ami.

Nous découvrons N’Djaména. Nous sommes dans une capitale, qui n’en a pas l’air.

Les routes goudronnées sont rares, 3 ou 4 grands axes. Le reste c’est de la piste de terre rouge tassée. Des bâtiments bas courent le long de ces grandes avenues trés larges. Peu de plantations, un grand rond point, son allée avec des arcades… et une ville composée de piste de terre évoluant d’angle droit en angle droit et qui sétalent au fur et à mesure que la population augmente.

Une station service au centre de la ville. J’apprendrais que c’est la seule station du pays. Je découvrirais par la suite comment les Tchadiens se procurent de l’essence.

Mon ami et moi nous rendons à la poste. Achetons une carte de téléphone. La plus grosse. J’appèle ma mère, lui raconte notre arrivée, lui raconte la chaleur, la rassure et lui affirme que je fais attention et que je prends soin de moi.

Mon ami fait de même, rassure aussi ses parents, ce sera sans doute le dernier mensonge qu’il leur fera.

La carte téléphonique est finit.

Nous nous payons le luxe d’acheter un pain au chocolat chacun dans la seule boulangerie du pays. Un bout de France à quelques milliers de Kms de celle ci. D’ailleurs dans ce pays, le pain couramment consommé c’est … la baguette mais vendu sur le marché.

Nous consacrons l’aprés midi a nous promener dans la partie de la ville qui évolue sans cesse, toujours des nouveaux patés de maison, mais en guise de maison des montages de terre, de boue, de tôles, de tuile, de pierre, de brique. Des enchevêtrements variés.

Nous prendrons notre première boisson dans un bouiboui composé de quelques tables et chaises, d’un frigidaire et donc d’électricité. Et comble du luxe, d’un mixeur. Je découvre les jus de mangue, je ne veux surtout pas me demander d’où vient l’eau, d’où viennent les glaçons. C’est bon, c’est ce qui compte. Et c’est servi dans une grande choppe à bière. Mon ami, prendra lui un coca, en suivant les recommandations sanitaires habituelles.

La suite… plus tard.

Mots d’enfants !

Dans la voiture l’autre jour:
Mon fils – maman on va chez macdo ?
Moi – Non car on va au restaurant !
Mon fils – … et mac do c’est pas un restaurant c’est …
Là il a un doute et il ne trouve plus le mot… il réfléchit et rajoute triomphant: …. une porcherie !

Moi (bidonnée de rire) – Heu non une sandwicherie ! 😀 Quoi que … 😀